jeudi 25 août 2011

le melon



Ma fille que j'aime,
quand tu liras cette lettre, donc, que tu seras grande, nous parlerons des hommes et de leur fierté fortement "testostéronée". Je vais t'en donner un exemple.

Pour cela sache ma fille, que ton premier repas autre qu'un biberon de lait en poudre, fut une purée de carotte qui n'a pas escomptée le succès attendu. Tu n'as pas vraiment ouvert la bouche, quant au goût de ce légume ... bof bof. Manque de sucre, couleur criarde, pas de lardons ni même une pointe de sel. Bref fadasse.

Ta mère, ta grand-mère et moi même, sommes restés sur notre faim devant la tienne inassouvie. Pourtant le festin fut préparé avec amour par ta mère sur un robot flambant neuf.
Les jours passants, tu n'as pas non plus vraiment progressé quant à la quantité ingurgitée. Bref nous oscillions entre désarroi et désespoir de te voir un jour aimer autre chose que de la poudre blanche...
même si celle ci est légale.

Comme je regarde les mioches agir et que je me souviens de ton oncle tout bébé -aujourd'hui très velu-, j'ai proposé de laisser de côté des légumes pour se concentrer sur "l'envie". Donc le sucre naturel, donc les fruits. J'ai proposé. Je me suis fais rabroué vite fait bien fait : "c'est pas encore le moment des fruits."
J'abandonnais lâchement toutes négociations.
Trois jours plus tard, je goûtais du melon. La pleine saison battait son plein, et il était plutôt pas mal. La bouche emplie de jus sucré grâce à sa chair. Délestant ces flots de plaisirs ensoleillés à chaque mastication, parfumèrent mon proche entourage. Très proche. Tu étais dans mes bras, alors que tes yeux de curieuse ne quittaient pas les petits dés de fruit qui disparaissaient dans ma bouche, je décidais de te faire goûter ce nectar. Tu as léché un petit peu puis ouvert la bouche en grand. j'ai souris et j'ai dû retirer le quartier de melon. Ta mère n'ayant pas donné son accord. La sainte parole maternelle. Le tampon sur le laisser passer culinaire. Tu m'as dit le reste ! bilan : deux points de moins dans l'oreille gauche.

Je tournais alors, fier -mais sourd- et avec la mine détestable des gens qui sont "trop sûr d'eux", mon regard vers ta mère.
Je comptais bien que cela vienne d'elle. Et ce fut le cas. A ma grande surprise je le confesse. Elle te prépara une purée de melon. La pauvre n'eut pas le temps de s'altérer tu l'engloutis en un temps record.
Je faisais silence mais espérait enfin un mot. il arriva :
- tu avais "raison" dit-elle, les fruits passent mieux.
MIRACLE ! trois jours pour les six lettres de "raison"  qui résonnent encore comme une victoire digne des plus grands stratèges. J'exagère un peu. Mais bon nous les mecs on aime se l'entendre dire, même si parfois c'est pas tout à fait vrai, qu'importe ! C'est ça ma fille la fierté "testostéronée" : dire à un gars qu'il est dans le vrai pour le faire avancer, que dis-je.. avancer ? courir ! Et même encore plus vite si possible. Oserais-je dire "Choper le melon" ?
C'est une arme, utilise là avec modération. Sans quoi la rancœur "testostéroné" est aussi mauvaise, crois moi.

Maintenant il nous est plus facile de proposer autres chose. T'es assez facile à nourrir : tout passe tant qu'il y a du pain. Et s'il est mêlé à du melon ou de la pastèque alors là c'est l'extase. Une telle extase, que tu ne résistes pas à l'envie de t'en recouvrir délicatement le visage, les cheveux, tes mains, mes lunettes ma chemise etc etc etc